Critique bilan : Le Prince des Ténèbres

Ça y est ! Après un an et demi de publication et 10 tomes sortis, une de mes premières séries de manga vient de se terminer. Et c'est par pur hasard que je me suis lancé dans Le Prince des Ténèbres. Trainant dans une libraire, la couverture a dû m'attirer et le synopsis a probablement achevé de me convaincre...

De son nom original Maoh : Juvenile Remix, ce manga est en fait une adaptation du roman d'un romancier japonais reconnu, Isaka Kôtarô, par une mangaka nommée Megumi Osuga qui s'est fait connaitre justement grâce à cette série. Au départ je me demandais quel rapport il y avait entre le titre original, Maoh Juvenile Remix, et le titre français, Le Prince des Ténèbres. En fait "Maoh" signifie "le Diable" et Juvenile Remix est là pour rappeler qu'il s'agit d'une adaptation pour un public plus jeune que le roman original. Le terme Prince des Ténèbres prend tout son sens à la fin de l'histoire.

La série a débuté en juillet 2009 en France pour se terminer en février 2011 avec le 10ème tome. La série date de 2007 au Japon.

L'histoire

La ville de Nekota est brisée par le taux de violence élevé qui sévit dans ses rues. Alors que les gens sont individualistes et laissent faire, un jeune homme du nom de Inukai monte en puissance contre les délinquants grâce à son assurance, son charisme et à son groupe : les Grasshoppers. Inukai veut changer la ville de Nekota et lutter contre la modernisation de la ville voulue par Anderson, un riche homme d'affaires qui veut tout transformer en un centre-commercial. Au départ comme tous les autres, Andô n'en peut plus de faire comme si de rien n'était et va,  avec l'influence de son petit frère Junya et l'apparition de Inukai, se dresser contre l'injustice grâce à un pouvoir qu'il avait enterré à cause des moqueries de ses camarades. En effet, Andô a la capacité de faire dire ce qu'il veut aux gens, un pouvoir des plus original. Et alors que toute la ville rejoint la cause de Inukai jusqu'à le considérer comme le messie, Andô est le seul qui garde les yeux ouverts : cet homme là a peut-être les meilleures intentions du monde mais sa manière de faire est des plus discutables. Notre héros en arrive à cette conclusion quand il voit à quel point les Grasshoppers, que ses camarades rejoignent à leur tour, sont brutaux, violents et manipulateurs. C'est ainsi que démarre ce terrible affrontement à distance entre l'idolatré de tous Inukai et le jeune inconnu Andô...

Mon avis

Si quelques lignes du scénario font penser à Death Note, avec l'affrontement entre deux jeunes hommes  dont l'un a l'ambition de changer le monde et ce don tombé du ciel, Le Prince des Ténèbres s'en détache assez pour être vraiment original. Les affrontements sont moins psychologiques et plus "sur le terrain" avec des combats sanglants. Les deux rivaux prennent beaucoup plus de risques que leurs confrères de Death Note. J'ai vraiment apprécié le fait que le pouvoir de Andô est beaucoup plus subtil et intéressant que la quasi-totalité des autres shônens. L'utilité de son pouvoir n'est de prime abord pas évidente mais suite à des expérimentations, Andô va essayer d'exploiter tout le potentiel de ce pouvoir. Faire dire ce que l'on veut à quelqu'un peut avoir des conséquences extraordinaires tant que les bons mots sont choisis pour les bonnes personnes. On garde quand mêmes les éléments caractéristiques du shônen à savoir un héros qui devient de plus en plus fort en fonction des situations de plus en plus dangereuses. Mais cela est-il réellement un défaut ? Je ne pense pas.

Cet aspect shônen assez light dans les premiers tomes, évolue grandement par la suite. Les personnages sont plus sombres, les enjeux plus importants et mettant en scène plus de camps, ce qui entraîne une complexification de l'intrigue. L'évolution fulgurante de Junya, le frère de Andô, est un point très important du manga car elle met la barre encore plus haute en faisant avec brio ce que d'autres auteurs de shônen n'osent pas faire. Ce personnage qui semblait si naïf et joyeux au début de l'oeuvre s'est transformé en un homme sombre et sinistre, devenu prêt à tout pour accomplir sa vengeance. Cela a pour moi transcendé cette série et multiplié l'intérêt que je lui portais : je n'en pouvais plus d'attendre le tome suivant.

Mais les autres personnages se sont pas en reste. Dans un nombre raisonnable, ceux-ci interviendront à un moment bien précis de l'histoire pour mettre leur grain de sel. Entre un bras droit particulièrement puissant qui tente d'écarter toute opposition, des assassins servant des commanditaires différents, une organisation qui ne rigole pas niveau torture, et des camarades de classes plus ou moins hostiles, la galerie des personnages est variée et intéressante. Mention spéciale à La Cigale, que j'ai trouvé particulièrement attachant et drôle (malgré son job).

La structure du manga m'a également particulièrement séduit. Au fil des tomes, tout semble construit pour un face-à-face qu'on devine déjà : Andô contre Junya. Mais Mme Osuga n'est pas tombé dans la facilité et n'a pas lésiné sur les retournements de situation. Toujours surprenants, ceux-ci relancent constamment l'intérêt et nous donnent envie de connaitre le fin mot de l'histoire. Cette fin justement, même si elle est relativement ouverte, conclue l'histoire que nous avions commencé et ne laisse pas les lecteurs sur leur faim. Elle permet de se poser quelques questions notamment sur la personne qui se cache derrière ce fameux Prince des Ténèbres. Et celui-ci n'est pas forcément celui auquel on s'attendait au début...

Je vais maintenant parler du dessin de Megumi Osuga. Si le character design n'est pas d'une originalité folle, surtout pour ce qui est des intervenants secondaires, on décèle une certaine patte unique. Le fait que la mangaka est une femme y est certainement pour quelque chose. On ressent également une bonne maîtriseslors des combats, avec des mouvements dynamiques et surtout des particules (de sang ou de sueur) particulièrement réussies. Le trait s'est considérablement affiné au fil des tomes, surtout en ce qui concerne les visages qui sont plus matures et sombres qu'auparavant. Si vous aimez les psychopates, ça va vous plaire !

Conclusion

Le Prince des Ténèbres, malgré le fait qu'il soit peu connu, est un très bon voire excellent manga que je conseille aux fans de thriller et de personnages torturés. Cette oeuvre est un exemple d'évolution dans le bon sens avec un intérêt qui croît au fil des tomes pour finir en apothéose sur un conflit géant et grandiose. Il y a également une véritable réflexion dans ce manga sur ce qui est bien et ce qui est mal. Et puis pour 10 tomes, c'est vraiment une très bonne affaire.